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Il avait déjà fait fuir Nicolas Hulot du gouvernement par son omniprésence dans les négociations avec le ministère de l’écologie, le lobby des chasseurs a eu encore gain de cause. Quand nous sommes tous confinés et cantonnés à une heure de détente à moins d’un kilomètre de chez nous, d’autres peuvent jouir librement de longues balades en forêt… à condition d’être armé ! Le gouvernement prétend protéger les cultures et maintenir la régulation des espèces pouvant les mettre en danger en offrant une dérogation aux chasseurs. Le « prélèvement » d’individus de certaines espèces serait donc une mission de service public. Les espèces en questions sont listées par chaque préfecture et peuvent concerner sangliers, cerfs, chevreuils, mouflons comme c’est le cas dans l’Hérault mais aussi lapins, lièvres, renards, corneilles noires, pies bavardes, corbeaux, daims, ragondins, pigeons ramiers, cormorans, étourneaux, ratons laveurs, etc. Il semblerait que pour pouvoir se balader en forêt, il faille être muni d’un fusil. 
Les loups sont les prédateurs des sangliers, les sangliers détruisent les culture, mais on augmente le nombre de loups abattus, ce qui augmente le nombre de sangliers restant en vie, que l’on doit alors aussi exterminer pour protéger nos cultures.
On est tou·tes d’accord que nous devons protéger nos cultures, mais est-ce que la chasse est la solution la plus efficace ?
Et si le loup était plus efficace que les chasseurs ?
C’est en tout cas ce que montre cette étude sur l’impact du cerf sur son écosystème et l’agriculture lorsqu’il cohabite avec une population de loups : 

« Les effets bénéfiques des loups comprennent leur capacité à atténuer les effets néfastes des cerfs sur la silviculture, l’agriculture, le tourisme et les écosystèmes naturels et à améliorer la santé et la sécurité des humains et de la faune. »

J-L. Martin, S. Chamaillé-Jammes and D. M. Waller – Deer, wolves, and people: costs, benefits and challenges of living together – Biological Reviews 2020

Concernant la  population de sangliers, d’autres études montrent une corrélation négative entre population de loups et de sangliers. C’est-à-dire que quand il y a plus de loups, il y a moins de sangliers, et inversement :
« The relative density of the wolf population increased between 1980 and 1987,and then decreased until the beginning of the 1990’s when it apparently stabilized.The density of the wild boar population showed an opposite trend ; decreasing between 1980 and 1985, and then inereasing until 1991. It decreased again between 1991 and 1993, and finally increased until 1995.  A significant negative relationship has been found between the relative density of wolves and the density of wild boars in Bieszczady Mountains during the period of 1980-1996 (e=0.611, p<0.001). » (https://www.jstage.jst.go.jp/article/wildlifeconsjp/2/4/2_KJ00003136345/_pdf/-char/ja)
Alors que le loup est le seul prédateur du sanglier en France, le gouvernement permet de les abattre en masse. Si l’objectif du gouvernement était de mieux protéger les cultures et de réguler les espèces pouvant les mettre en danger, il viserait à favoriser le développement du loup.
Or, le nombre de loups pouvant être abattus a été augmenté à 19% de la population de loups, soit près d’un loup sur 5 tué cette année en France. (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042472114)
La dérogation accordée aux chasseurs est donc une faveur accordée à cet électorat choyé et à ce lobby qui tue par plaisir.
Mais qu’en est-il des effets négatifs des loups ?
En effet, il faut aussi prendre un compte les effets négatifs qu’ils peuvent avoir sur l’activité humaine et en particulier l’élevage de moutons. Dans leur combat contre le loup, les bergers ne doivent pas être méprisés ou diabolisés mais doivent être inclus dans l’élaboration de solutions pour une meilleure cohabitation entre humains et loups. L’étude montre que l’attitude des hommes à l’égard des loups peut évoluer du conflit à l’acceptation quand les conflits sont résolus via des approches collaboratives qui respectent les différences de valeur :

« Our review shows that human attitudes towards wolves can shift over time and among regions from conflict to acceptance when conflicts can be resolved through collaborative approaches that respect differences in values. »

J-L. Martin, S. Chamaillé-Jammes and D. M. Waller – Deer, wolves, and people: costs, benefits and challenges of living together – Biological Reviews 2020

C’est pour toutes ces raisons qu’on attend que le gouvernement renvoie les chasseurs chez eux et qu’il laisse les promeneurs, cueilleurs et glaneurs se balader dans nos forêts. Si on est tous d’accord que se promener en nature contribue à la bonne santé physique et psychologique des gens et ne génère aucun risque sur la propagation du virus, on aurait tous aimé en profiter !  En attendant, un seul conseil à celles et ceux voulant ramasser des champignons : passez votre permis de chasse.
Article publié le : 16 novembre 2020